Dans le village de Cassagnabère, une rue porte désormais le nom de “Chemin du Cardin”, à la suite du nouvel adressage de la commune. Cardin n’est pas une référence au créateur de mode Pierre Cardin décédé récemment, mais à l’oiseau, le chardonneret, dont le nom en occitan est « cardin ». Le hasard fait que quelques semaines avant cet événement, un habitant de cette rue racontait sa fascination pour les chardonnerets qu’il voyait nombreux autrefois.
Comment reconnaître le chardonneret ?
Plus petit que le moineau domestique, le chardonneret (Carduelis carduelis) ne mesure pas plus d’une dizaine de centimètres. Il se reconnaît facilement au premier coup d’œil grâce à son coloris si beau à observer : un masque rouge vif sur la face, souligné d’une ligne noire autour du bec, et des ailes jaune citron et noires. Son dos et le cou sont brun clair. Le milieu de la poitrine et l’abdomen sont blancs. Mâle et femelle arborent quasiment le même plumage. Son bec est court et conique, pour extirper avec dextérité les graines de leur réceptacle, en évitant les piquants parfois redoutables qui les protègent.
Un oiseau lyrique !
Non seulement son plumage bariolé et ses couleurs chatoyantes font de lui un oiseau d’apparat, mais il possède également des capacités vocales hors du commun qui le distinguent des autres oiseaux chanteurs. Le chardonneret chante de mars à fin août, et c’est souvent le mâle. Rapide, entrecoupé de roulades, ensorceleur, le chant du chardonneret a séduit, rois perses, conquérants omeyyades, des fins connaisseurs de la musique jusqu’aux simples profanes. Le chardonneret a cette faculté d’imiter et améliorer le chant de ses congénères.
Où l’observer ?
Le chardonneret est visible toute l’année. Seule une partie des individus rejoignent le sud en hiver, remplacée par des oiseaux venus de l’est de l’Europe. C’est un des plus jolis passereaux de France. Présents sur tout le territoire, c’est une espèce protégée. Son nom vient du chardon (cardus en latin), sa nourriture favorite.
Le chardonneret est un oiseau granivore. Dans la nature, il se nourrit dans les friches et les hautes herbes : il a besoin de zones où la végétation est basse. Il est ainsi friand des graines d’Asteracées, vaste famille de plantes au sein de laquelle figurent le chardon (cardères, cirses, panicauts), la bardane, le séneçon, la centaurée, l’aster, le tussilage… En hiver, il apprécie aussi les graines de bouleau, de conifères et d’aulne. Lors de la nidification, il complète son alimentation par des petits invertébrés (larves, pucerons, petits diptères…), qui servent aussi à nourrir ses oisillons. La période de reproduction se situe au printemps, avec une ponte en mai.
Le chardonneret niche dans les jardins arborés ou bordés d’une haie touffue. Il construit son nid dans les haies et les arbres, à seulement quelques mètres du sol. Il aime en revanche se percher en hauteur, sur les grands arbres, qu’il utilise comme poste d’observation, avant de fondre sur une tête de chardon. Cet acrobate participe ainsi au contrôle de certaines des plantes les plus gênantes dans les potagers.
Carduelis elegans peint par John Gould (1804-1881)
Comptez les chardonnerets dans votre jardin
Ce week-end des 30 et 31 janvier 2021, la ligue pour la protection des oiseaux (LPO) et le Muséum national d’Histoire naturelle de Paris (MNHN) invitent la population à participer au comptage national des oiseaux des jardins, pour la 9ème année consécutive. Chaque participant est convié à compter, à observer et même à photographier les oiseaux de son jardin, d’un parc public ou même sur votre balcon ! Cette opération de sciences participatives, qui a lieu chaque année pendant le dernier week-end de janvier, est à la portée de tous. C’est un moyen simple et concret de rendre les citoyens acteurs de la connaissance et de la protection de notre avifaune.
Comment faire ? La méthode est simple : il s’agit d’observer pendant une heure (en fin de matinée ou en début d’après midi de préférence lorsque les températures sont un peu plus chaudes et les oiseaux plus actifs), les oiseaux de son jardin et de transmettre les données sur le site Internet de l’Observatoire participatif « Oiseaux des Jardins » : www.oiseauxdesjardins.fr. Pour les reconnaître plus facilement, des fiches peuvent être consultées sur ce même site. L’équipe des oiseaux des jardins reste également à la disposition des participants pour les aider à identifier les oiseaux observés en envoyant de simples photos à : oiseauxdesjardins@lpo.fr. Chaque année ces données viennent s’ajouter à celles des années précédentes pour permettre d’en apprendre d’avantage sur ces « oiseaux communs ». Bien sûr, rien ne vous empêche aussi de compter les oiseaux dans les jours qui viennent avec une météo un peu plus clémente ou le reste de l’année ! Alors, verrez-vous des chardonnerets dans votre jardin ?
Comment attirer les chardonnerets au jardin ?
Comme pour la plupart des autres oiseaux nicheurs, le nombre de chardonnerets a considérablement baissé. La destruction des haies et des habitats naturels (urbanisation) et l’agriculture intensive nuisent au chardonneret, en supprimant les sites de nidification et les sources de nourriture. Qu’ils soient insecticides, désherbants ou fongicides, les pesticides (l’agriculture en France en répand chaque année plus de 65 000 tonnes) ont tous des effets sur la santé des oiseaux et causent leur mort lente. Le chardonneret est désormais un espèce protégée et classée comme vulnérable en France métropolitaine. Quand une espèce perd un quart de ses effectifs en dix ans, comme c’est le cas pour le chardonneret élégant par exemple, il est ajouté à la liste rouge des espèces menacées en France. Cette liste, éditée par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), ne cesse de s’étoffer. Les scientifiques tirent aujourd’hui la sonnette d’alarme. Le risque à terme est qu’il ne reste qu’un petit nombre d’espèces qui prendraient la place de toutes les autres. La fin de la biodiversité menacerait la survie même de l’homme.
Pour attirer le chardonneret dans nos jardins, la première bonne attitude est donc de ne pas utiliser de pesticides. Vous pouvez planter les espèces qui produisent les graines qu’il consomme, notamment des Asteracées. A la mangeoire, la préférence du chardonneret va au tournesol, aux cacahuètes et aux petites graines comme le chènevis et le millet. Le niger, riche en lipides, est également intéressant pour lui, notamment en hiver. Pensez aussi à planter une haie touffue où il pourra faire son nid au printemps. Offrez-lui un ou deux grands arbres pour qu’il puisse s’y percher, bien en hauteur. Plantez ainsi des bouleaux, des conifères et des aulnes, vous aurez de bonnes chances d’observer le chardonneret ! Comme tous les oiseaux granivores, il a besoin d’eau pour compenser la sécheresse de sa nourriture : installez-lui une soucoupe d’eau propre. En revanche, il n’est pas intéressé par la graisse. D’une manière générale, composez votre jardin de manière à y favoriser la biodiversité : le chardonneret y trouvera son compte, comme de nombreux autres petits animaux.
Plantons une haie pour le chardonneret dans sa rue !
En 2019-2020, la mairie de Cassagnabère-Tournas a décidé de créer unilatéralement une extension de cimetière, sans aucune concertation avec les habitants du quartier. Cette parcelle prélevée sur un quartier résidentiel aurait pu être un merveilleux jardin, un « éden du cardin », puisqu’elle se trouve au beau milieu de la rue désormais appelée « Chemin du Cardin » et est visible depuis chaque extrémité.
Prémonitoire, la proposition a été faite dès mai 2020 – bien avant la divulgation du nom de la rue en novembre 2020 – pour que soit plantée une haie haute et continue le long des murs Sud et Ouest. 12 raisons justifient aujourd’hui cette proposition ! Il y a tout d’abord la place de la mettre sur ces deux côtés (avec notamment 1,50 mètre de profondeur de disponible sur la rangée le long de la route). Elle donnerait du sens au « Jardin du souvenir », dont la stèle où est gravé « Jardin du souvenir » est dressée sur une dalle de béton face à un mur de 2,30 mètres de haut… Cette haie créerait de l’ombre, recherchée en été notamment au moment des enterrements. Elle apporterait de la verdure et de la vie à cette parcelle minérale désormais toute bétonnée et entourée de bitume. Elle rappellerait aux passants le carré de verdure à jamais supprimé. Cette végétalisation honorerait le nom du village qui signifie « belle chênaie ». Sa création ne coûterait rien à la commune et apporterait beaucoup en valeurs. Elle masquerait la vue, notamment pour la sortie des enfants de la butte du stade de football. Dans cette rue entièrement bitumée, une haie permettrait d’illustrer davantage le caractère champêtre du « chemin » d’antan. Avec le haut mur érigé, le chemin se fait actuellement corridor de béton lorsque l’on passe à pied ou en voiture au niveau de cette extension de cimetière. Un peu de verdure estomperait cet effet et permettrait aussi aux oiseaux d’avoir une haie supplémentaire. Enfin, cette haie serait un geste cohérent et symbolique (pensons à la légende du colibri popularisée par Pierre Rabhi avec son mouvement Colibris) et montrerait la volonté de Cassagnabère de se saisir de l’urgence en faveur de la biodiversité et du climat.
Cette proposition positive, écologique et consensuelle à tous points de vue a été adressée par courrier et par e-mail au maire actuel de Cassagnabère-Tournas et à son conseil municipal en mai 2020 puis de nouveau en décembre 2020. En 10 mois, aucune réponse n’a été donnée. Est-ce normal ? Les chardonnerets et oiseaux en général auront-ils droit à une haie dans leur rue au printemps 2021 ?